Auprès des personnes auxquelles il est envoyé, le chrétien doit éviter d’apparaître en « monsieur qui sait tout », de se garder de tout mouvement d’humeur devant ses échecs et enfin de renoncer à croire qu’il maîtrise tout le processus d’annonce de l’Évangile.
Le disciple de Jésus ne garde pas pour lui les richesses que son maître lui a offertes. Le chrétien désire au contraire les partager avec ses semblables. Animé de l’Esprit de Jésus, il s’en remet aux inspirations de la troisième personne de la Trinité pour mener à bien sa mission. En effet, la meilleure méthode d’évangélisation restera toujours la spontanéité et la liberté de celui ou de celle en qui habite la charité et qui désire faire connaître et « goûter combien le Seigneur est bon » (Ps 33,9). Toutefois, « le serviteur n’est pas au-dessus de son maître », dit Jésus à ses apôtres (Jn 15,20). Ce qui signifie que la mission est soumise à certaines contraintes auxquelles n’échappa pas la mission par excellence que fut celle du Fils envoyé par le Père. L’évangélisation ne s’opère jamais sans renoncements de la part du missionnaire. Sur ce plan, le chrétien possède trois modèles à suivre : Jésus, le Père et enfin la Vierge Marie. Examinons ces renoncements à la lumière des modèles qui les illustrent parfaitement.
1- Éviter les attitudes de surplomb et les tentations de rejet
Renoncer à une position de surplomb. En entrant dans le monde, Jésus n’a pas revendiqué « le rang qui l’égalait à Dieu » mais il a pris « la condition d’esclave » (Ph 2,6-7). À son exemple, le chrétien est appelé à se faire serviteur et, dans cet esprit, à bannir toute attitude hautaine envers ceux auxquels il est envoyé. Le missionnaire doit éviter de se poser en « monsieur qui sait tout », en super-chrétien, condescendant à l’égard des « non-initiés ».
2- Accepter l’adversité avec douceur fait davantage avancer le Royaume que l’agressivité ou la volonté d’imposer ses arguments de toute force.
Renoncer à toute contrainte. Ici, c’est le Père qui sert de modèle au chrétien. De même que Dieu a renoncé à user de la violence pour « épargner son propre Fils » (Rm 8,32) dans le drame de la Croix, de même le chrétien acceptera les refus, les incompréhensions, les retards avec bonne grâce. La mission ne lui appartient pas. Elle est d’abord l’affaire de Dieu. De plus, la non-violence est le propre de sa religion. Accepter l’adversité avec douceur fait davantage avancer le Royaume que l’agressivité ou la volonté d’imposer ses arguments de toute force. Le missionnaire doit agir en toute liberté, ce qui suppose qu’il laisse la leur à ceux auxquels il annonce l’Évangile.
3- Laisser à Dieu la maîtrise des événements
Renoncer à tout comprendre. Là, c’est Marie qui nous sert de modèle. La mère de Jésus a suivi son Fils sans toujours tout saisir de ses intentions. Par exemple, après l’avoir retrouvé dans Temple de Jérusalem en train de s’entretenir avec les docteurs de la Loi alors qu’il n’avait que douze ans, l’évangéliste note que Marie et Joseph « ne comprirent pas la parole que Jésus venait de leur dire » (Lc 2,50). Marie vivra de la foi durant tout le ministère public de son Fils. Debout au pied de la Croix, elle se résignera à ne pas tout comprendre des desseins de Dieu, s’en remettant à Lui dans une foi et une charité admirables. Pareillement, le missionnaire doit accepter d’être désorienté par le cours que prennent parfois les événements et se laisser évangéliser lui-même par les rencontres avec ses semblables. C’est l’Esprit Saint qui conduit la mission et souvent ses voies ne sont pas les nôtres. Les désirs du missionnaire doivent s’effacer devant les plans de Dieu lorsque les circonstances l’exigent, de même que Marie adhéra à la Croix alors qu’elle eût tout fait pour l’éviter à Jésus si elle eût suivi ses inclinaisons naturelles.
Ainsi, ces trois renoncements inhérents à la mission du chrétien représentent les jalons essentiels d’une démarche qui respecte la liberté des bénéficiaires de l’annonce de la Résurrection et qui amène, dans un même temps, le missionnaire à comprendre que Dieu est toujours plus grand que ce qu’il imagine à son sujet.
Jean-Michel Castaing – Aleteia
publié le 12/01/23