La piété d’Édith Piaf

« C’est lui qui, dans les jours de sa chair, ayant présenté avec de grands cris et avec larmes des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort, fut exaucé à cause de sa piété . » Edith Piaf

« Edith Piaf ne chantait pas, elle devenait son chant. Une incantation, entre Ciel et Terre […]. Dans les strates de cette voix magique se trouve la foi d’Édith…», écrit Pierre Fesquet.  Edith Piaf, née dans la misère, est, en effet, une enfant de la balle dont les ascendants appartiennent au monde du spectacle depuis deux générations. Elle est née à Belleville, de Louis Gassion, artiste acrobate et de Annetta Maillard, artiste lyrique, le 19 décembre 1915. Arletty  dit d’Edith qu’elle avait hérité de la voix de sa mère.

Au sujet de sa mère, son fils Herbert dit qu’elle était une grande artiste partie à la dérive sous l’effet de la drogue et de l’alcool, « la dérive, le mot est gentil ». Ses parents, mariés en 1914, divorcent en 1929. Son Père aura une autre fille de ses liaisons, Denise, qu’Edith aidera plus tard à s’installer au Canada.

Sa mère confie sa fille à sa grand-mère maternelle, Emma Saïd Ben Mohamed, et la fait baptiser à Saint-Jean-Baptiste de Belleville. Dix-huit mois plus tard, son père donne la garde d’Edith à sa grand-mère paternelle, Louise, dite « Maman Tine », patronne d’une maison close à Bernay, en Normandie. Edith y habitera quelque temps.  Elle n’aime guère l’enfant, mais Edith reçoit l’affection des pensionnaires, filles de joie réduites aux tristesses de l’amour sans amour et projetant sur elle une tendresse maternelle dont elles sont privées.

Dans cette maison où se trouve un piano, Edith y mange pour la première fois à sa faim, buvant du lait de Normandie et portant de jolies robes. L’enfant souffre d’une double kératite entraînant sa cécité. Lisieux n’est pas loin. La grand-mère et les filles prient Thérèse sans relâche, et quand l’enfant recouvre la vue, toute la maison ferme un dimanche, pour se rendre sur la tombe de la sainte et la remercier de cette « guérison ».

Ce miracle marque Édith. Elle devient pieuse, fréquente régulièrement les églises en dehors des offices pendant ses tournées, porte une croix ou une médaille autour du cou et prie avant d’entrer en scène. Sur sa table de nuit trône un portrait de la sainte et chaque année, elle pélerine au carmel de Lisieux.

Edith a sept ans à peine quand son père, la reprend avec lui pour vivre la vie d’artiste de petits cirques itinérants. Il a la main leste, montre peu de tendresse pour sa fille, collectionne les maîtresses qui traitent l’enfant plus ou moins bien.

A neuf ans, elle révèle son talent et sa voix d’exception, après le numéro d’acrobatie de son père.

A dix ans, elle fugue à Saint-Jean-de-Maurienne, en Savoie, puis chez sa grand-mère à Bernay, où son père vient la rechercher.

A quinze ans, elle quitte définitivement son père pour chanter dans la rue avec Simone Berteaut, dit « Momone », son amie et son « ange maudit ».

A dix-sept ans,  elle rencontre son premier grand amour, Louis Dupont, dit « P’tit Louis », garçon-livreur. Enceinte, Piaf continue à chanter à l’aide d’un porte-voix dans les rues puis au bal musette. De leur union naîtra Marcelle surnommée « Cécelle ». Édith Piaf quitte assez rapidement son époux pour vivre d’autres rencontres… Marcelle meurt d’une méningite tuberculeuse, âgée de vingt-huit mois. Edith se prostitue afin de pouvoir payer l’enterrement de sa fille.

À l’automne 1935, Édith Piaf, dans sa vingt-cinquième année, est découverte par un gérant de cabaret sur les Champs-Elysées, Louis Leplée. Il devient son mentor et son père adoptif, lui donne un nom de scène « La môme piaf ». En 1936, elle enregistre son premier disque qui connaît un succès public et critique immédiat. Dans les années 40, dans sa trentaine, elle triomphe avec Paul Meurisse, puis, au printemps 44, avec Yves Montand, dont elle propulse la carrière.

Les années d’après-guerre en font une artiste internationale.

Le 10 octobre 1963 à 13 h 10, Édith Piaf meurt à quarante-sept ans d’une rupture d’anévrisme. Un demi-million de personnes suivent sa sépulture. L’aumônier du théâtre et de la musique, le père Thouvenin de Villaret, la bénit au moment de l’enterrement à titre personnel, l’église catholique refusant de lui accorder des obsèques religieuses en raison de sa vie tumultueuse.

Jésus a prié et supplié son Père « avec de grands cris et avec des larmes » et a été exaucé « à cause de sa piété ». La piété filiale est un des sept dons du Saint Esprit. C’est grâce à elle que Jésus est ressuscité : « Ayant présenté avec de grands cris et avec larmes des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort, [Jésus] fut exaucé à cause de sa piété ». Cette piété a été accordé à Edith qui, selon nos standards, est loin d’être une sainte. Peu importe, elle a su accueillir ce don et le garder jusqu’à la mort. Comment accueillir au mieux ce don qui a les promesses de la vie éternelle ? Voilà la question de ce Vendredi Saint.

Ce don a été accordé à Edith :

  • Grâce à la constance d’une prière de groupe. La grand-mère d’Edith et ses filles comme elle nommait les prostituées de sa maison close, « prient Thérèse sans relâche  »
  • Grâce à la gratitude. Quand elle est guérie, « toute la maison ferme un dimanche, pour se rendre sur la tombe de la sainte et la remercier . »
  • Grâce à une gratitude entretenue. « Piaf ne lâcha jamais la main de Thérèse. Et garda toujours les yeux vers le Ciel… Édith priera chaque jour cette grande sœur . »
  • Grâce à une prière simple, spontanée, faite du fond du cœur. Avant chaque spectacle, elle se signe et prononce toujours la même prière : « Thérèse, maintenant, je chante pour toi ! » Elle est là pour remercier Thérèse ! « La véritable piété, dit Jésus, se trouve dans le cœur  ».
  • Grâce à sa discrétion. « Sa vénération pour Thérèse conduisait Edith en un éclair à Lisieux, aller-retour dans la journée, en cachette de tout le monde, généralement accompagnée d’une personne étrangère à sa première sphère d’amitiés . » « L’âme vraiment pieuse, dit Jésus, fuit tout ce qui peut la porter aux nues et la flatter. »
  • Grâce à sa « crainte » révérencielle de Dieu. « Dans les pires moments, au fond de l’épuisement physique, Piaf demandait toujours qu’on l’aidât à s’agenouiller pour prier. « On ne prie pas allongée, mais à genoux » », disait-elle.
  • Grâce à sa foi. Dans les années 50, Edith donne des récitals à guichets fermés. Quand elle n’en peut plus, elle se retire dans la campagne du Lot, pour prier à Gluges, près de Martel. « Entre cinq petites minutes dans une église et parle à Dieu. Tu verras comme il répond bien à ceux qu’il aime » répétait-elle à ses amis en désarroi. Le curé de Cahors, l’abbé Delbos, y célèbrera une messe pour elle quelques jours après sa mort, parcourant 1000km (aller-retour) pour prier pour elle.
  • Grâce à sa dévotion pour sa sainte, Thérèse de l’Enfant-Jésus. « Au ciel, je retrouverai Thérèse », dit Edith, quelques jours avant sa mort, en 1963 .

Le don de piété « unit les volontés humaine et divine », dit Jésus à sainte Cabrera de Armida. Sans aucun doute, à vue humaine, Edith Piaf, n’était pas arrivée à un degré parfait de ce don. Mais il n’y avait dans sa piété aucune « farce », aucune « comédie », ce n’était pas « l’ombre de la piété », comme le reproche Jésus à ce monde. Sa piété était vraie et authentique. La « fausse piété qui remplit le monde et même les ordres religieux » dit Jésus, le blesse. Edith possède « la vraie piété », celle qui va « au fond du cœur, arrache les vices et plante les vertus, en ne recherchant que la Croix. »   Elle connaissait la grandeur de Jésus crucifié : « L’enfant a grandi, je le vois, il vient partager nos misères. Déjà il porte sa croix. Je vois une grande lumière qui semble venir de loin. Bientôt reviendra sur la terre la vie, la pitié et l’amour », chante Édith dans « Sœur Anne ».

« Le chemin de la croix […] est le seul chemin qui conduit les âmes au ciel et les sauve », dit Jésus. Mais qui embrasse la croix ? Qui en a la force ? Personne. Edith avait trouvé la clé qui la donne : le don de piété. Ce don répand « le feu de l’amour actif et, avec cette force divine, les âmes deviendront capables des plus grands sacrifices . »

Veux-tu être capable de la croix, demande au Saint Esprit le don de piété.

Prions : « Esprit Saint je te demande la piété, afin que je puisse embrasser la croix en vérité. Amen. »

Auteur : Père Geoffroy de Lestrange, mars 2024.

 

 

 

 

 

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